mercredi 15 juin 2016

Réponse à l’éditorial de David Cohen dans Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence

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Après une première salve de courriers adressés au Président de la République, auxquels j’ai déjà répondu, David Cohen, chef de service de pédopsychiatrie à l’hôpital Pitié-Salpêtrière, publie en éditorial de Neuropsychiatrie de l’Enfance et de l’Adolescence une nouvelle lettre au Président en défense de la pratique du packing pour les enfants autistes manifestant des troubles du comportement. Texte servilement repris et monté en épingle par Eric Favereau dans Libération. Analysons donc les arguments qui y sont avancés :

  • Le packing est assimilé à une pratique bénigne : la thalassothérapie. Dans ce cas, pourquoi ne pas plutôt envoyer les enfants autistes en cure à Quiberon ? Ou les mettre dans un jacuzzi bien chaud, plutôt que dans des draps glacés ? Cela serait certainement jugé plus agréable par les enfants et moins contestable par les parents. Et d’après les données disponibles, cela ne serait pas moins efficace que le packing. 
  • Le packing est utilisé peu fréquemment. Néanmoins cela ne dédouane en rien de la nécessité de justifier rigoureusement l’utilisation du packing dans les quelques cas concernés.
  • La pratique du packing est ancienne. Pas aussi ancienne, toutefois, que la saignée, la thalassothérapie, l’acupuncture et la corne de rhinocéros.
  • Des éléments de « preuves » d’efficacité sont avancés. Ils sont purement anecdotiques, s’agissant d’études de cas et de séries de cas sans condition contrôle. A peu près toutes les pseudo-médecines peuvent en dire autant.
  • Les différentes instances qui ont examiné la pratique du packing dans des services hospitaliers français ont considéré qu’il était pratiqué dans le respect des droits et du bien-être du patient[i]. Autrement dit, la pratique n’est pas maltraitante, contrairement à ce qui est parfois avancé par certaines associations. On peut certes regretter que certaines associations agitent les chiffons rouges de la maltraitance, voire de la torture, et influencent des instances internationales pas toujours très expertes dans le but de susciter des condamnations médiatiques. Néanmoins, même si l’on rejette l’accusation de maltraitance, en quoi respecte-t-on les patients lorsqu’on leur propose des soins sans efficacité établie et sans mécanisme d’action connu, sur fond de théorie douteuse ?

En effet, on notera qu’à aucun moment dans cet article les justifications théoriques et les mécanismes putatifs de l’action thérapeutique du packing ne sont expliqués (si ce n’est le lien avec le « moi-peau » attribué à Pierre Delion). Et pour cause, la théorie sous-jacente est tellement fumeuse et détachée de toutes données factuelles qu’il serait bien embarrassant de la dévoiler au Président de la République, tout comme au grand public.

Au final, aucun argument sérieux n’est avancé à l’appui de l’utilisation du packing dans les établissements de soins médico-sociaux ou à l’hôpital. A titre de comparaison, imaginerait-on faire financer par l’assurance-maladie la corne de rhinocéros au seul motif que son usage est ancien, peu fréquent, que des patients et des médecins ont déclaré en être satisfaits, et que son usage se fait sans maltraiter les patients ?

Car l’enjeu de ce débat n’est pas l’interdiction du packing, mais son financement par l’assurance-maladie dans les hôpitaux publics et les établissements médico-sociaux. A l’heure actuelle, considérant les données disponibles, il peut être légitime de continuer les recherches cliniques sur l’efficacité éventuelle du packing, mais il n’existe tout simplement aucune justification à financer le traitement par packing avec de l’argent public, pas plus qu’il n’y a de justification à y former des générations de psychomotriciens en leur faisant croire qu’il s’agit d’une pratique efficace faisant partie légitimement de leur répertoire.

Plus généralement, il est parfaitement normal que le Secrétariat d'État chargé des Personnes handicapées, et plus généralement le ministère de la santé, conditionne les financements publics à l’efficacité des traitements. On ne peut que souhaiter que cette approche soit poursuivie avec plus de zèle bien au-delà du packing : quid de l’homéopathie, de l’acupuncture, de la psychanalyse, et de bien d’autres pseudo-médecines qui sont au moins partiellement financées par l’assurance-maladie lorsqu’elles sont pratiquées en milieu hospitalier ou par des médecins libéraux ? Une utilisation rationnelle des fonds publics supposerait de rembourser les actes en fonction de leur efficacité scientifiquement établie, plutôt que simplement en fonction du diplôme du praticien ou du statut de l’établissement (cf. Ramus, 2012).

Franck Ramus


[i] L’avis du Haut Conseil de la santé publique mérite tout de même d’être lu pour bien apprécier toutes les réserves qui y sont associées à la pratique du packing.

30 commentaires:

  1. Bonsoir,

    non seulement ce professeur demande que la méthode du packing soit financée, mais surtout demande au gouvernement de "contrôler" les associations de parents. Il écrit de façon scandaleuse : "Je regrette aussi que sur son initiative soit discuté un statut spécial pour la formation continue des médecins dans l’autisme laissant une large part aux associations de parents. Pourquoi ne pas demander aux « opérés de l’appendicite » de former les chirurgiens viscéraux ?"
    Pratique de la médecine d'un autre âge avec l'argent de la sécu.

    V. Lochmann

    http://vivrefm.com/infos/lire/3024/autisme-un-pedopsychiatre-demande-a-francois-hollande-de-controler-les-associations-de-parents

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  2. Que fait l'ordre des médecins contre les charlatans ?

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  3. A mon avis, dans le passé ou présent je n'ai pas vu s'accuser entre eux pour ne pas nuire à leurs réputation. C'était entre les hommes politiques ou médecins ce se sera pareil que je chasse les membres de l"ordre des médecins sont
    sortis de même moule.

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  4. J'ai un jour demandé à un psychiatre psychanalyste comment il pensait "soigner" un enfant autiste sans langage, il m'a répondu : "on lui fait toucher les murs pour lui faire prendre conscience des limites de son corps"... J'aimerais bien savoir comment il "sait" que cet enfant n'a pas conscience des limites de son corps, en dehors des élucubrations de certains auteurs qui ne s'abaissent pas à appuyer ce qu'ils écrivent sur des études sérieuses ! Alors si vous leur enlevez le packing, que va-t-il leur rester pour justifier leur rémunération ?

    Halte au racket sur l'argent de la sécu !

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  5. Le packing est assimilé à une pratique bénigne : la thalassothérapie. Dans ce cas, pourquoi ne pas plutôt envoyer les enfants autistes en cure à Quiberon ? Ou les mettre dans un jacuzzi bien chaud, plutôt que dans des draps glacés ? Cela serait certainement jugé plus agréable par les enfants et moins contestable par les parents. Et d’après les données disponibles, cela ne serait pas moins efficace que le packing. > où est l'argent ? Il faudrait venir dans les services de psychiatrie. J'ai effectivement vu ça dans une seule clinique privée.

    Au sujet de la recherche, le drame, c'est qu'elle semble empêchée pour des raisons idéologique.

    La théorie sous jacente est fumeuse, peu importe. On regarde si ça fonctionne ou pas selon les règles d'EBM avant de juger.

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  6. > où est l'argent ?
    D'après la description faite par David Cohen, le packing est une pratique qui est loin d'être bon marché: elle requiert l'intervention de plusieurs soignants simultanément. Le personnel, c'est ce qui coûte le plus cher. Je serais preneur d'une analyse de coût comparée avec le fait de laisser un enfant barboter dans un jacuzzi sous l'oeil d'un surveillant.

    De manière plus générale, la journée d'un enfant autiste en ESMS est facturée 200 à 1000€ à l'assurance-maladie, qu'on y fasse du packing, de la pataugeoire, du psychodrame, ou rien du tout. Les moyens sont là, la question est leur bonne utilisation.

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  7. > Au sujet de la recherche, le drame, c'est qu'elle semble empêchée pour des raisons idéologique.

    Je suis d'accord, depuis le début je dis qu'il ne faut pas entraver cette recherche. Malgré tout, idéologie ou pas, on peut difficilement en vouloir aux parents qui ne souhaitent pas que leur enfant participe à cela. Quelles bonnes raisons auraient-ils d'accepter, autre que le désespoir et l'ignorance?

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  8. > La théorie sous jacente est fumeuse, peu importe. On regarde si ça fonctionne ou pas selon les règles d'EBM avant de juger.

    Bien sûr. Cela dit, cela fait plusieurs décennies que les praticiens du packing auraient pu regarder si cela fonctionne ou pas selon les règles de l'EBM, et s'ils l'avaient fait, on n'en serait pas là. Quelle justification peut-il y avoir à défendre et à perpétuer une pratique qu'on n'a jamais pris la peine d'évaluer en 30 ans?

    Par ailleurs, s'il est vrai que certains traitements marchent sans que l'on comprenne pourquoi, les théories fumeuses n'invitent pas à dépenser de l'argent public dans les essais cliniques. Il existe une infinité de pseudo-médecines reposant sur des théories fumeuses, il est impossible de toutes les tester rigoureusement. On est bien obligé de faire un tri sur la base du rationnel.
    Voyez les centaines de millions de dollars engloutis en pure perte par l'institut américain des médecines complémentaires et alternatives, tout ça pour montrer qu'aucune n'est supérieure au placebo! N'avait-on pas mieux à faire avec tout cet argent?

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  9. Bonjour Monsieur.

    Je lis avec curiosité vos prises de postions sur la question de l'autisme, elles sont celles d'une autorité sur ce sujet.

    Mais je me pose la question suivante : quelle est votre expérience de praticien auprès d'enfants souffrant d'une telle affection ?

    En effet, lorsqu'on opère une fracture du col fémoral, on a des protocoles en tête, mais chaque cas est particulier et il faut faire face à l'imprévu. C'est en cela que la médecine est une forme d'artisanat qui ne s'apprend que par un long parcours clinique, c'est à dire, étymologiquement, au lit du malade.

    L'autisme n'échappe pas à la règle, quand bien même on ne le verrait que comme un handicap à rééduquer. La médecine de rééducation existe et elle s'apprend de la même façon que toutes les autres.

    Je vous saurai donc gré de m'éclairer sur votre parcours auprès d'enfants autistes de tout type, notamment les plus graves, ceux qui n'ont pas de langage, un retard massif des acquisitions, des stéréotypies.

    Bien à vous

    William

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  10. Nicole 2229
    J'ai quelques remarques sur la lettre de Dr David Cohen.
    Je me permets de les poster ici.

    Le Docteur David Cohen commence par décrire le packing : « envelopper dans des draps humides des personnes, en règle générale, en situation d’agitation ou d’automutilation, pour essayer d’apaiser et de contrôler ces troubles du comportement. »
    La description elle même est succincte, on peut même dire édulcorée par rapport aux descriptions du Pr Delion. Pas de serviettes, pas de notion de température de l'eau ni de durée du packing.

    Comme beaucoup de soignants depuis quelques années, le Dr Cohen utilise le mot humide alors que le Pr Delion a bien écrit serviettes trempées. En réalité, comme on a pu le voir dans le reportage de l'express, elles sont trempées et tordues à la main, ce qui reste bien mouillé et non pas humide.
    Plus ou moins volontairement, la pénibilité du soin est cachée, pourquoi?

    Il dit que le polémique a commencé avec le reportage de TV5,  :
    http://www.dailymotion.com/video/x1qp34_autisme-france-5_tech
    « alors même que les images présentaient une séance de packing pratiquée par un psychomotricien avec un enfant qui paraissait calme et détendu, qui chantonnait et souriait. »
    Les deux enfants sont effectivement calmes, Pas de rage, pas de crise. Quand elle arrive, la jeune fille est très calme, elle ne s'agite que face à l’insistance de Stéphane. Ils ne font visiblement pas partie de la règle générale définie par le Docteur Cohen : « situation d’agitation ou d’automutilation, pour essayer d’apaiser et de contrôler ces troubles du comportement. ». Seraient-t-ils des cas particuliers ?
    Le Docteur Cohen n'entend pas Omar crier MAMAN au moment où on l'emballe, il n'entend pas Manon dire NON, il ne voit pas qu'elle se tient presque recroquevillée, assise sur le banc, qu'à un moment, elle a tellement peur qu'elle garde la bouche bée.

    Dans ce reportage qu'on apprend à quoi sert le packing :
    « Notre ambition en fait, c'est que ces enfants puissent vraiment se mettre à parler »
    « Le but du pack c'est de contenir là où ça fuit quelque part, il y a des enfants qui sont très agités ou dans une rage dans une des crises d'angoisse massive. On a envie de les prendre ... Tout un chacun a envie de les protéger, de les prendre, de les tenir dans ses bras, c'est ce qu'on fait avec le pack sauf que l'on provoque quelque chose de fort avec le froid, on les tient, on les saisit. Il faut les saisir, ils ont besoin de ça. On a vu très rapidement des enfants s'apaiser, même des enfants les plus malades. »
    Le pack permettrait d'apprendre à parler
    Les enfants fuient, de véritables passoires, et c'est pour ça qu'il faut les emballer bien serrés, pour que ça ne fuie plus !!!
    On nous montre des enfants calmes et on nous parle de rage et de crise d'angoisse massive, pourquoi ?
    Il semblerait que le pack permette à Stéphane de faire ce qu'il a envie : prendre les enfants dans ses bras.
    Les enfants s'apaisent rapidement, oui, Omar qui crie, qui crie MAMAN, soudain sa bouche se ferme. Très troublant...



    C'est en toutes lettres que le Pr Delion relie packing et psychanalyse.
    « Quelque temps plus tard, cette technique est utilisée par des aliénistes du XIXe siècle pour apaiser les agitations des malades mentaux, mais pratiquée sans la référence freudienne – et pour cause –, elle ne devient, dans la plupart des cas, ni plus ni moins qu’une contention. » 
    érès | Revue de psychothérapie psychanalytique de groupe
    2011/2 - n° 57
    pages 47 à 54
    Pourquoi alors le Dr Cohen écrit t-il « Pour les associations, le packing devient la psychanalyse déguisée » ? sous entendu que ce ne serait pas vrai.

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  11. William, je n'ai strictement aucune expérience ni aucune prétention clinique. Et alors?

    Ma démarche est indépendante de toute expérience clinique. Elle est simplement d'exiger que les médecins respectent leur code de déontologie, aient des connaissances scientifiques à jour, et appliquent les bonnes pratiques fondées sur ces connaissances et établies au niveau international, avec comme vous le dites, les protocoles en tête prêts à faire face à l'imprévu de chaque patient, bien sûr. J'ai la même exigence pour les opérations du col du fémur, bien que je n'aie aucune compétence dans ce domaine. Malheureusement il y a de bonnes raisons de penser que cette exigence qui peut sembler évidente pour la fracture du fémur est loin de l'être pour l'autisme.

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  12. J'avais un même écrit un article à ce sujet:
    http://franck-ramus.blogspot.fr/2012/07/de-quoi-je-me-mele.html

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  13. Merci pour les précisions quant à vote connaissance concrète du monde de l'autisme, qui est donc, vous le dites, inexistante.

    La médecine, je vous le disais, ne s'apprend pas que dans les livres mais par ce qu'on pourrait appeler, l'Expérience Based Médecine, ExBM.

    C'est encore plus vrai pour la psychiatrie où jusqu'a présent, on a pas réussi à évaluer en terme d'items standards, par exemple, un sourire franc, une attitude détendue. Cela ne se met pas sur une paillasse de laboratoire comme des fichiers Excel.

    Néanmoins je vous vois sincère et passionné par le sujet.

    Dés lors, il pourrait vous être utile de venir voir quelques situations concrètes du quotidien d'un hôpital de jour. Vous pourriez observer ceci qui est ordinaire : un enfant de trois ans tourne sur lui même sans relâche, son éducatrice le contient un quart d'heure pour qu'il s'apaise, et au moment où cela semble acquis, il la mord profondément et recommence pendant qu'un autre, effrayé, se met à pousser des cris glaçants. Sa collègue est occupée aux toilettes à changer un troisième. La cadre de santé, elle, se forme loin de là à l"Identification du patient à toutes les étapes de la prise en charge", c'est à dire à comment mettre des photos des petits correctement dans le dossier pour être conforme aux recommandations de la HAS.

    Fort de quelques demi-journées de ce type, vous pourriez là dessus faire une revue de la littérature à comité de lecture avec un impact factor rassurant et nous travaillerions de concert pour améliorer cette cause qui vous tient à coeur.

    Mais il faut vous engager à publier en toute déontologie.

    Bien à vous

    William.

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  14. Cher William,

    Vous reprocher à Mr Ramus de ne pas avoir de contact avec les personnes autistes et de ne se baser que sur la théorie, mais il est étonnant de constater que l'expérience quotidienne des parents est fortement contestée par votre ami le Pr Cohen qui refuse que les parents confrontés au quotidien de la vie avec des personnes autistes donnent leur avis. Il demande même au gouvernement de "contrôler des associations de parents". D'un coté vous refuser le droit à Mr Ramus d'avoir une opinion en raison de son manque d'expérience de terrain, mais votre ami le Pr Cohen dénie le droit des parents en raison de leur manque de théorie et de sciences.... N'y a t-il pas là une contradiction ?

    Est-ce que vous et votre ami n'êtes pas juste en train de refuser l'échange, le débat, la contradiction, bref la démocratie?

    Mes hommages William.
    Mais William comment déjà? Pourquoi ne pas donner votre nom? Manque d'expérience ? Manque de théorie, ou manque de courage ?

    Vincent Lochmann

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  15. Monsieur Lochmann,

    "Je le pansai, Dieu le guérit". C'est d'Ambroise Paré.

    la relation médecin-malade n'est pas un "débat démocratique", non plus une science exacte.

    Il y a d'un coté le médecin qui a la tâche, lourde à l'excès, d'avoir en tête la configuration de la maladie d'un patient, ses possibilités d'action, souvent limitées hélas, et, à la fin, l'annonce du verdict, la mort.

    Tout médecin a eu dans sa formation affaire à ça. Certains ne l'ont pas compris, il en est de mauvais, comme dans tout.

    Ainsi j'ai le souvenir de ce vieux maître en chirurgie orthopédique qui annonçait la main sur l'épaule d'une aimable personne âgée dont le pied était gangrené, complication d'un diabète : "papy, faut vous couper la patte", et l'autre de protester en pleurant. Mais le patron, l'air grave, l'avait persuadé, "c'est ça, où le cimetière dans huit jours".

    En sortant de la chambre, il était aller fumer sa cigarette l'air absent, nous, jeunes internes, avions compris ce jour qu'on ne faisait pas le boulôt pour le prestige de l'uniforme et étions bien loin des séries de QCM du concours de l'internat.

    C'était tout sauf un "débat démocratique". Mais, le papy s'était rétabli, un pied en moins.

    Aujourd'hui, car cette histoire va sur ses vingt ans, le malade aurait pu faire une recherche internet, sortir des articles, des méta-analyses conseillé par un avocat ou un héraut de la cause des diabétiques ... ce qui avait alerté notre notre maître, c'était la sinistre odeur, l'aspect blême du talon, des indices capitaux mais assez subjectifs, impossibles à numériser.

    La relation médecin-malade est déséquilibrée, qu'on le veuille ou non. Elle ne sera jamais, ni un "débat démocratique", ni une choix de consommateur. Ce sont des pièges démagogiques. Elle a évolué pour un plus grand confort de soin, ce n'est pas uniquement à l'initiative des usagers, les soignants ont énormément participé à l'évolution des pratiques, je pense notamment aux infirmières. Mais il restera un enjeu de pouvoir, on met sa peau dans les mains d'un autre, ou pire, celle de son enfant.

    Je ne suis pas l'ami du Pr. Cohen et ne connaît pas sa façon de travailler. Je sais en revanche qu'il accueille dans son service des cas d'enfants et d'adolescents très malades, qui ne seraient pas admis ailleurs, qu'il faut traiter avec les moyens de la psychiatrie qui sont en majeure partie empiriques. De quelque théorie qu'on se réclame, la biologique, la psychanalytique ...

    Enfin, j'ai beaucoup d'expérience, un peu de théorie et je manque parfois de courage pour affronter des cas difficiles, cela m'empêche souvent de dormir.

    Je suis un anonyme parmi les médecins, mais ma proposition de stage à Monsieur Ramus était sérieuse.

    Bien à vous

    William

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  16. Bonjour Dr William,
    Votre description de quelques situations concrètes du quotidien ressemble plus un un appel au secours parce qu'il y a un manque de personnel qu'à un argument pour défendre la pratique du packing.
    Soutenir une personne qui refuse l'intervention des parents, n'est-ce pas refuser une aide qui peut être précieuse ?

    J'espère aussi que tous les médecins savent reconnaître une jambe gangrenée.
    Là n'est pas le problème, la seconde et non moins importante qualité de votre maître est d'avoir dit la vérité. Alors que les documents que l'on peut consulter à propos du packing sont tellement contradictoires qu'il est légitime de douter de la véracité de certains propos des promoteurs de cette pratique.

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  17. William, vous concluez un peu vite que je n'ai aucune connaissance concrète du monde de l'autisme. Je connais la littérature scientifique sur l'autisme bien mieux que beaucoup de pédopsychiatres. Et je connais aussi beaucoup de personnes autistes et leurs familles. La pratique clinique n'est pas la seule source de connaissance ni la seule forme d'expérience qui vaille.

    L'anecdote sur votre professeur d'orthopédie ne dit strictement rien. Les symptômes de la gangrène ne sont pas subjectifs, ils sont parfaitement objectivables et ils s'apprennent. Si votre maître était un bon médecin il a détecté ces symptômes sur la base à la fois des connaissances rigoureuses qu'il avait acquises et sur la base de son expérience. Mais l'expérience sans les connaissances ne vaut rien. Car s'il a coupé la jambe à tort, il n'aura jamais pu le savoir par son expérience, puisqu'il n'a pas pu conduire l'expérience contrôle (que serait devenu ce patient si la jambe n'avait pas été coupée?). L'expérience du médecin a ses limites. Il faut espérer que votre maître amputait sur la base de connaissances solides plus que d'intuitions subjectives.

    Quant au caractère non démocratique de la médecine et de la science, c'est exactement ce que j'ai écrit à vos collègues psychanalystes dans ma précédente lettre:
    http://franck-ramus.blogspot.fr/2016/05/autisme-lobscurantisme-contre-attaque.html
    Cela n'empêche pas de respecter les patients et leurs familles.

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  18. Madame Nicole,

    le packing n'est que l'emblème de la lutte contre la psychiatrie publique.

    La vraie question est ailleurs.

    La folie, pardonnez moi mais le terme n'est pas honteux à mes yeux, est ce que l'homme rejette le plus profondément. Hélas, elle fait partie de sa condition et lui est spécifique.

    D'où le slogan : "l'autisme n'est pas une psychose ...".

    Certes, il n'en reste pas moins qu'il faut s'occuper des gamins et que je ne vois pas les neuro-pédiatres s'en charger, même si on nous prouve à longueur de temps, depuis le traité de Bayle en 1826, que le trouble est incontestablement neuro-développemental.

    Cordialement

    William

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  19. Monsieur Ramus, vous connaissez peut-être des "personnes autistes", mais vous ne les soignez pas.

    C'est radicalement différent.

    Quand à l'exemple de mon maître, il représente la terrible responsabilité du médecin, il faut faire un choix qui parfois n'est pas le bon.

    On ne dialogue pas comme ici d'ordinateur à ordinateur avec un malade.

    On est seul. Avec sa mémoire qui n'est pas infaillible, peu de temps, sa crainte de se tromper. C'est la relation soignant-soigné.

    A votre disposition

    William.

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  20. PS. A l'attention de Mr. Ramus.

    Si vous m'attribuez le titre de psychanalyste, je ne l'ai pas car je n'ai pas supporté l'ambiance qui règne dans ces écoles.

    S'il s'agit de mes collègues psychanalystes, j'en fréquente d'intelligents et d'honnêtes, forts bons thérapeutes. La même chose pour les praticiens systémiques, cognitivistes, biologiques ...

    Il y a des imbéciles, ils se reconnaissent à leur sectarisme.

    Pour se faire une idée précise, il faut venir voir, sans crainte ! Research Gate, c'est bien mais il faut franchir le pas et vivre l'expérience.

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  21. Bonjour Docteur,
    SVP, ne tombez pas dans la paranoïa du club des 39.
    Il me semblait que le mot folie n'a pas de signification du point de vue médical.

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  22. Bonjour Nicole,

    je disais folie au sens social. Les troubles psychiques stigmatisent encore beaucoup hélas.

    Quant aux 39, même s'il y a un coté zorro, ça vaut le coup d'aller voir, il y a des personnes géniales.

    Moi je vais faire une formation ABA !

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  23. cher Franck
    vous n'avez jamais soigné un patient autiste
    aussi concentrez vous sur ce que vous connaissez
    votre travaux de recherche sur le Qi sont très pertinents
    et arrêtez cette démagogie réductrice qui n'est pas digne de vous
    François Bassompierre

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  24. Merci pour vos bons conseils, je ne manquerai pas d'en tenir compte.

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  25. Bonjour Dr William.

    L'ABA, m'a toujours fait penser à Mme Helen Keller et au film 'Miracle en Alabama' que j'avais vu quand j'avais l'age de la jeune héroïne. Je ne sais pas si les formateurs en ABA parlent de cette histoire. Mais c'est avec plaisir, qu'hier j'ai retrouvé ce film en ligne. (il y a 6 parties).
    miracle en Alabama part1 - vidéo Dailymotion
    miracle en Alabama part2 - vidéo Dailymotion
    miracle en Alabama part3 - vidéo Dailymotion
    miracle en Alabama part4 - vidéo Dailymotion
    miracle en Alabama part5 - vidéo Dailymotion
    miracle en Alabama part6 - vidéo Dailymotion

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  26. les adresses n'étaient pas bien passées
    http://www.dailymotion.com/video/x9s0ph_miracle-en-alabama-part1_shortfilms
    http://www.dailymotion.com/video/x9s0v3_miracle-en-alabama-part2_shortfilms
    http://www.dailymotion.com/video/x9s71f_miracle-en-alabama-part3_shortfilms
    http://www.dailymotion.com/video/x9s8tc_miracle-en-alabama-part4_shortfilms
    http://www.dailymotion.com/video/x9smdu_miracle-en-alabama-part5_shortfilms
    http://www.dailymotion.com/video/x9smqq

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  27. Nicole, savez-vous qu'une des premières mères ayant écrit un livre sur l'éducation de sa fille autiste expliquait qu'elle s'était énormément appuyée sur le travail d'Anne Sullivan, la personne qui a éduqué Hélène Keller. Le livre en question s'appelle "the siege" et a été traduit en français en 1972 sous le titre : "l'histoire d'Elly". L'auteur, Clara Park, décédée il y a quelques années, a été une des premières militantes pour l'éducation des enfants autistes.

    Petite anecdote perso,c'est ce livre qui m'a fait comprendre quel était le problème de mon fils (43 ans aujourd'hui). J'ai depuis rencontrée Clara et "Elly" , de son vrai nom Jessy Park, dont vous trouverez les oeuvres sur internet (et le wikipedia de sa mère Clara).

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  28. Pour William

    Frank n'a pas "soigné" des personnes autistes.

    Moi non plus, cependant, cela fait très longtemps qu'en tant que neuropsychologue, j'aide des personnes autistes à vivre mieux et à développer leur potentiel. Certes je ne suis pas médecin, mais un certain nombre de vos confrères vous diront que l'autisme ne se soigne pas, sauf lorsqu'il est lié à des problèmes médicaux identifiés.

    Je suis également mère d'un adulte qui a eu la chance de grandir dans des pays anglo saxons, où un des meilleurs psychiatres de l'époque a fait le diagnostic (quelle ironie, il s'appelait D. Cohen - D pour Donald - et était chef de la pédopsy de Yale Child study center). Il n'a pas soigné mon fils, mais nous a encouragé dans la voie éducative qui était déjà la règle à l'époque (années 70 !)

    Des enfants ou adultes qui s'automutilent gravement, j'en ai connus beaucoup au cours de ma carrière. Les meilleures réponses ont toujours été la prévention qui nécessite de la part des intervenants une bonne connaissance des modalités de fonctionnement des personnes autistes, et l'éducation qui donne une compréhension de l'environnement et des moyens de communication.

    Si vous en doutez, allez donc faire un tour dans ces FAM qui accueillent des adultes dont la plupart étaient en psychiatrie. Entre la diminution des traitements et le travail éducatif, les résultats sont remarquables. Si vous en doutez, regardez l"histoire d'Acacio : https://www.youtube.com/watch?v=xbKnxfrUxoQ

    Non, Frank ne soigne pas de personnes autistes, mais il connaît très bien ce travail et échange avec beaucoup de personnes concernées.

    Je vous souhaite à vous aussi de continuer à vous informer. Nous sommes à votre disposition pour cela.

    Chantal

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  29. Bonjour,

    Non, je ne savais pas pour Clara et Elly.
    je vais regarder.
    Je suis enseignante. C'est à avec des mots tels que troubles psychiques qu'un de mes jeunes mathématiciens a du quitter l'école. J'ai contacté une association de parents et en suis toujours membre depuis.

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